La Singer 44K3 de Simanco33

Lachenaude est allé me la chercher à Fumel, près de chez lui. Elle était utilisée, depuis des générations, dans une ferme de la région. Cette machine n'a pas cousu que des dentelles mais elle était, néanmoins, utilisée pour un usage domestique.

Je la mets donc avec les Singer familiales… limite professionnelles, comme la Singer 306M.


Elle était vendue sans table mais avec tout son "accastillage".


Elle avait été stockée dans des conditions difficiles mais, heureusement, avait été copieusement graissée. Partout les mécanismes étaient figés par du "cambouis" qui, finalement, s'enlève facilement et conserve bien les mécanismes.

Elle avait son aiguille (heureusement), sa bobine et son porte bobine spécifique.

Le corps et le lit de machine étaient "piqués" comme si cette machine avait effectué des travaux avec des pièces portant des éléments métalliques (des côtes de maille, tu crois,  Pascal?).
Tout le haut de machine était "scalpée" et même limé.

Elle a été fabriquée en 1900 à Killbowe, Ecosse. Elle est donc largement centenaire... il lui sera pardonné un peu d'usure d'usage.

Je cherchais depuis longtemps une "44". Je l'imaginais faire la jonction entre les "15" et les "31" Singer. J'en avais trouvée une à La Ciotat, dans un atelier à bateaux, mais la personne avait refusé de l'envoyer car trop lourde (elle était offerte, on ne pouvait pas trop en demander).


En effet, elle pèse 19Kg  à la bascule. Lachenaude m'avait demandé si 44K était le poids de la machine. Il est taquin. Avec ses bibelots verts, c'est sûr, il ne fait pas dans le rugueux, bien que les Hurtu…!

J'ai trempé dans le pétrole et frotté longuement.

Je me suis posé la question : quel niveau de restauration faire sur une presque professionnelle, bien abîmée, plus que centenaire?

Finalement mon choix est arrêté et je ferai ainsi pour mes autres industrielles : peindre le lit et faire des raccords pour sauvegarder au maximum les décalque, frotter tout ce qui est métal nu mais ne pas enlever de matière. Les microns sont précieux pour qu'elle reste fonctionnelle.




Je ne frotterai pas d'avantage le cachez rond arrière… on dirait la lune!

Sur la plaque de canette il est marqué : "PATENTED 1883-1890 1891-1893"… le XIX siècle, quoi!...



Pour repeindre, j'ai procédé comme m'a enseigné "Pascal de Sedan", compagnon restaurateur au forum.

J'ai mis à "blanc" le métal du lit et du sommet de corps de machine (avec une raclette de carrossier), j'ai donné un coup d'antirouille "Julien", poncé au papier à l'eau (mélangé à du bicarbonate pour enlever l'acidité et par superstition). J'ai mis une couche d'apprêt noir, séchée au souffleur thermique, une couche de noir métallisé (Opel), séchée au souffleur, une couche de vernis voiture, séchée à nouveau au souffleur.

Apprêt, peinture et vernis (de voiture) sont de la même marque pour que les produits soient compatibles entre eux.

J'avais déjà procédé de la sorte avec mes autres machines et ça n'a pas bougé depuis.

Pour le sommet de la machine, j'ai procédé comme avec la Meister 101. J'ai camouflé à partir des décalques. J'ai peint, par touches légères, mes trois couches de produit.

J'ai enlevé les caches. Quand la peinture était sèche au toucher j'ai estompé les raccords avec du papier huilé pour amoindrir la jonction entre le neuf et l'ancien. Un travail de restauration de tableaux. En peinture à l'huile on appelle çà du "glacis". C'est les Chinois avec leur laque, qui ont inventé…

Quand tout était vraiment sec, avec un tampon à lustrer, j'ai un peu vieilli la partie neuve pour qu'elle se fonde bien avec la partie ancienne.

A la loupe, on verrait bien qu'un travail de restauration a été fait mais pour une "professionnelle" bien rugueuse de ce type, la démarche est suffisante et me convient.

J'ai installé la machine sur mon pied Singer industriel (celui de ma Singer 103K que je traiterai bientôt)


"Grand-mère sait faire du roller ♪♪"

J'ai rajouté l'accastillage. Je l'avais préparé en laissant une jolie patine qui ne jure pas avec l'ensemble.
J'ai installé une grosse courroie en 9 mm achetée chez Aliex. J'ai huilé la courroie avec de l'huile de pied de bœuf car celle-ci était bien rêche et bien rigide.


J'ai installé et réglé mon fer de genouillère de relève pied. J'ai laissé un deuxième type de releveur pour l'adapter à mes autres machines.


Pas besoin de la cale en bois pour supporter la machine, les charnières la retiennent mais je l'installerai, plus tard, pour mes autres machines.


Comme sur toutes mes machines, avant d'essayer, je vérifie la synchronisation (on peut jouer sur la hauteur de tige d'aiguille). C'est OK mais il me semble qu'il y a beaucoup d'espace entre le crochet et l'aiguille. La pointe du crochet n'affleure pas suffisamment l'aiguille. Je règlerai cela plus tard si je veux coudre avec du fil fin (rapprocher la tête de machine de quelques centièmes?... pas facile à démonter, je ferai plutôt comme on réglait les dérives des avions de chasse, demandez à RJ2, il doit connaitre).

Avec le gros fil industriel le fil est pris et remonte bien.



En suite, choix de l'aiguille car il faut qu'elle couse!

Problème (qui n'en est pas un), l'aiguille d'origine fait 45mm (presque) mais le chas est à la même hauteur que les 44mm industrielles dont je dispose. Le millimètre en plus est situé entre le chas et la pointe. Je chercherai sur le tableau que nous a fourni Thierry si on peut encore trouver ce type d'aiguilles.


Le pied d'origine est de format industriel. Je vais pouvoir utiliser ma petite collection de pieds Aliex.


Je prépare la canette. J'ai entre temps trouvé un petit  bloc de tension pour le porte fil. Il baigne dans le W40. Je monterai, là j'ai un peu retenu le fil à la main, comme les couturières.


J'ai enfilé la machine. J'avais consciencieusement nettoyé le bloc de tension et réglé la position du ressort de rappel, comme souvent, déréglée.


Je sélectionne des pieds avec "roulette", pratiques pour le cuir ou le skaï. Je n'ai pas de vieille vareuse bien épaisse, aussi, j'utilise mes bouts de housse de divan.


… ça roule!


Mon préféré est ce pied qui ressemble à des rollers… décidément grand mère sait faire du roller!


J'essaye aussi les bobines de fil industriel rouge qui étaient fournis avec ma Singer 310K6 (que je ferai bientôt) et qui ont cousu les dernières espadrilles faites à Bayonne Saint esprit.


La machine s'accommode bien des grosses aiguilles et du gros fil. Elle passe bien les épaisseurs.


Il y a d'ailleurs plus d'un centimètre de dégagement de pied.

J'ai installé mon éclairage qui s'accroche à la tige de bobine de fil.

Une question : à quoi servent les ergots qui séparent, en deux parties, le réglage de longueur de point? J'ai cru d'abord à un réglage de marche arrière… hélas, non. Il faudra trouver une notice…



Pour comparer les proportions, j'ai mis à côté une Singer 15K88 (que je devrai finaliser prochainement, pour offrir). Elles sont bien à la même hauteur. Mises côte à côte, la "15" semble être plus loin par un faux effet de perspective.

J'ai encore une fois "commis" une petite vidéo "téléphone" pour pouvoir faire entendre le joli bruit mécanique.


Pour une machine de 120 ans qui, à l'évidence, a beaucoup servi, ce n'est pas mal!

bien le reflet du pantalon accordéon sur le cadre TV
Cà donne le tempo

Dommage qu'on ne puisse adapter les pieds à roulement sur une low shank...

Sublime reportage : donne envie de faire aussi bien     MERCI !
UN détail : Coté construction avion radiocommandé et piètre pilote, je n'ai pas tenté les avions de chasse, pointus à mettre en oeuvre.

Il me faut  souvent les pièces  en mains pour peaufiner un réglage.
Les mains, curieusement, travaillent souvent déconnectées du cerveau  

Difficile de paraître sérieux un 1° Avril mais c'est vrai !
Encore Merci
Rj2

Moi, je l'aurais quand même mise dans les "industrielles", elle en a toutes les caractéristiques. Ça va encore faire des confusions, déjà qu'il y en a des qui postent leurs questions n'importe où...

Un jour, je vais passer par là et me dire "qu'est-ce qu'elle fait là celle là ? ", et elle va déménager...

Jolis descriptif et restauration avec toujours de belles photos reportage
Cette machine a un bien beau cliquetis de couture ... et semble de première jeunesse ! Mais elle fait plus industrielle que familiale, non ?

PS: Thierry est passé avant moi et répond à ma question, que ce serait plus une "indus"...

Ce sont des "Borders Line"... ok, il n'y a que la ranger dans les industrielles.

Mon épouse est d'ailleurs d'accord... "hors de salon, zouuu!... dans le garage!... moi qui la trouvait si "mignonne" (la machine)... ok , je range avec mes indus!...

(je vais me faire un atelier "indus" dans le garage, rien que pour moi... et sewing du forum)

t'as pas une vie facile Victor
Heureusement toute la collection n'est pas Border Line

Même dans le forum elle est Border Line
Sauvée de la casse mais reléguée...

hé, mais je l'avais pas vu !!!!

beau boulot, c'est plus du tout celle que j'étais allé te chercher à plus de 40 bornes de chez moi !!!

beau bruit, bon son, ahhhhhhh, c'est chouette !!!


et pour ma Bernina ???

j'ai une 730 à vendre , pas cher, envoyez les mp

je pense que je vais me faire corriger dans pas longtemps !!!!

D'ailleurs, pour avoir rencontré, et beaucoup discuté avec les enfants de l'ancienne propriétaire, cette machine était, lorsqu'elle a été achetée, vers 1930/1940, uniquement "familiale".

La famille résidait à Saint Georges (47, près de Fumel), et était très loin de l'industrie, mais bien plus proche de la "décavaillonneuse (ça, c'est pour les vignerons, macarel!!!!)

Elle a du en recoudre, des fonds de pantalons ....

Eh oui, c'est comme ça. Il y a des gens qui ne circulent qu'en ville, mais il leur faut un quatre roues motrices...

si j'allais en ville, je roulerais en Ami Citroën
mais je ne vais jamais en ville.

Bonjour Simanco,

Petites questions pratiques au sujet de ta technique :
"...poncé au papier à l'eau (mélangé à du bicarbonate pour enlever l'acidité)"
"... j'ai estompé les raccords avec du papier huilé pour amoindrir la jonction entre le neuf et l'ancien."

Est-ce du papier à poncer (pour le métal) que l'on humidifie ou huile ? Pour diminuer l'action abrasive du papier à poncer ? Et aussi, quelle quantité de bicarbonate ?
D'autre part pour les retouches locales, quelle taille/type de pinceau utilises-tu ? (je vais devoir en faire autant pour la New Home vu que je ne décape pas tout et je voudrais pour le moment préserver autant que possible les décors restants en attendant de pouvoir faire mieux).

Merci et bonne journée !

Pour répondre à Lilique :

Ma première machine complètement repeinte avait été une Singer VS de 1889. Elle m'avait été donnée comme bonne à la ferraille. Je ne risquais rien, aussi en suivant les conseils de Pascal, je l'ai complètement poncée et repeinte.



J'explique ma démarche sur le post :
https://lamachineacoudre.forumactif.org/t1543-la-singer-vs2-puis-la-128k-et-la-28k-de-simanco33?highlight=simanco33

Mon deuxième essai fut une Clemens Muller N°2bis (c'est son nom). J'avais déjà une Clemens Muller N°5 en état "musée", je ne risquais rien d'essayer de sauver cette N°2 bis promise à la casse.

https://lamachineacoudre.forumactif.org/t1484-clemens-muller-machine-n2-bis-de-simanco33?highlight=simanco33

Le deuxième essai m'a également satisfait.




Le problème pour des peintures plus localisées c'est présenté sur la Meister 101 noire.

https://lamachineacoudre.forumactif.org/t2612-les-meister-101-de-simanco33?highlight=simanco33

Cette machine présentait des décalques que je voulais garder et un logo en métal "indécollable". D'ailleurs une personne avait, au par avant, essayé et avait rayé profondément de métal avec un objet en métal (burin?). Il manquait, de plus, le "r" à la fin du logo.

C'est là que j'ai essayé ma méthode :
J'ai juste mis "à blanc" la partie à reprendre. Dans le cas de cette machine j'ai, en plus, utilisé du mastic de carrossier car les entailles étaient profondes. J'ai peints à l'apprêt, à la peinture noire et au vernis, toujours des peintures de la même marque et séchage au souffleur thermique entre chaque couche pour chasser les solvants (méthode Pascal le Dob de Sedan, grand pêcheur devant l'éternel, des piranhas en plus!).

Comme je n'avais "camouflé" que la partie à reprendre, il y avait donc une marque à la jonction.

J'ai alors, sur la peinture qui était juste sèche au toucher et avec un petit tampon de "sopalin" mouillé d'huile de paraffine, estompé la jonction par petits frottements dans un mouvement circulaire. En travaillant cette jonction cela faisait un glacis que j'estompais en allant vers la partie ancienne. Une fois tout sec (plusieurs jours plus tard) j'ai "patiné" l'ensemble avec un tampon "jex" pour enlever le brillant de la partie refaite et la fondre avec l'ensemble de la machine.

Le résultat me convenait. Une fois huilé on ne voit presque plus la différence.

J'ai fait la même chose avec la Singer 44K. Comme celle-ci était, par contre, attaque par la rouille j'ai rajouté un autre principe. J'ai passé de l'antirouille "Julen", laissé sécher et comme le métal "dérouillé" avait comme une couche de sel blanc, j'ai poncé au papier de carrossier que j'ai mouillé dans  de l'eau où j'avais mis un peu de bicarbonate, pour enlever l'acide de l'antirouille.


Cette partie là, je compte sur le forum pour me la valider où me montrer le chemin à suivre en cas d'erreur de ma part.

Mais bon, il ne faut pas se mettre martel en tête, il faut savoir relativiser, ce ne sont que de vieilles machines et c'est moins grave qu'une pandémie…

Merci Simanco !
Cela me plaît bien, vu que je ne mettrai pas à blanc (pour le moment ?) toute la machine ni les parties ayant souffert, je n'avais pas saisi le principe du papier à l'eau et à l'huile (comme la souris verte ? ), maintenant c'est ok !

Une question concernant ces machines 44 k, quel style de boîtier porte canette et de canettes pour cette machine ? Les mêmes que les 15 k ?  Les mêmes que les 31k15 ? Et où peut-on en trouver de bonne qualité, parce que les chinoiseries ça commence à bien faire... J'en ai pêché une, mais dans un tout autre état que la tienne. Presque complète mais manquent à l'appel le porte canette et le ressort de pression du bloc. 
J'en suis au polissage des jolies pièces à la meule de coton et la pâte a polir. 
Elles sont marrantes ces machines, on dirait une 15 obèse qui aurait plus mangé quand elle était petite. 

C'est les mêmes boîtiers que pour les Singer 31. Ils ont le "doigt" plus court que pour les 15. La canette n'est pas la même non plus. 

Neuf il sera "forcément" chinois chez Ebay ils ont çà... forcément chinois. Les miens était d'origine comme sur mes "31"

D'occase il y a aussi ce revendeur sur Ebay ici .

Merci pour le tuyau, je vais me procurer ça. Question canette, c'est pas les standard donc. À l'occasion, un petit coup de pied à coulisse serait d'une grande aide. Je vous la présenterai l'année prochaine, là elle n'est pas encore montrable ( sauf pour un amateur de rouille rouge des Ardennes )

 Mes deux pieds à coulisse ont la pile vide! J'ai donc attrapé le "Roch" du lycée... Les canettes de la "31" et "44" font, 21x9 mm, celles de la "15", 20,5x11 mm.

Ce sont les Simanco 55623 si je ne dis pas de bêtise https://www.singersewinginfo.co.uk/simanco/55623

OK je vous remercie pour ces informations, yapuka ! Bonne soirée à vous.

Encore merci pour votre réactivité, j'ai commandé un bloc de tension neuf, un porte canette et une poignée de canettes. Avec ça il n'y a pas de raison ça devrait tourner. À bientôt

Bipe Bipe a écrit:Ce sont les Simanco 55623 si je ne dis pas de bêtise https://www.singersewinginfo.co.uk/simanco/55623

Punaise je sais pas d'où je sors ça, mais si je prends les parts lists des 31k15 et 47, le numéro Simanco des canettes est 2996

André reviens, ce n'est pas les bonnes!... Tu parles, il est loin maintenant!...

Elle est bien belle cette 44. C’est un beau travail de restauration et une excellente idée de repeindre simplement le lit
Elle donne envie de la tester pour faire des belles surpiqûres