Les Elna 1, 3, Lotus ZZ et 2 Supermatic de Ramon Casas (et de) Simanco33

Lors de l'a remise à hauteur de la Necchi Bu et de la MIP V90 j'avais été surpris du fait que vers les années "50" beaucoup de machines étaient passées à la forme carré verte alors que depuis des décennies elles étaient de forme noire et toutes en rondeurs.
Beaucoup de marques avaient repris cette forme, cette couleur et on retrouvait parfois les mêmes structures innovantes.


J'avais demandé qui avait été précurseur dans ce choix. Thierry m'a redirigé vers un des sites qui évoquait la Elna "Grasshopper". Je suis tombé sur la saga très intéressante, pour moi et mon vécu, de l'épopée Ramon Casa…
http://needlebar.org/main/elna/index1.html

C'est donc Dr Ramon Casas, un espagnol, qui chassé par la guerre civile espagnole était allé en Suisse proposer ce qui allait être une machine révolutionnaire pour son époque. La société " Tavaro s’appropria les droits de la machine et engagea ses services."

(https://elna.pl/historia-marki/)

"Son esprit inventif" mis au point une machine révolutionnaire la Elna1. Elle s'inspirait des machines industrielles et apportait comme innovation pour l'époque, pour une machine "domestique" : la fabrication carrée en aluminium, la couleur verte, le moteur électrique intégré, un éclairage électrique intégré, le bras libre, le chargement de bobine horizontal, une marche AR, une commande au genou, une jolie boîte à accessoires intégrée, la boîte de rangement qui servait de plan de travail.
Même la forme en "caisse à munitions" de sa boîte de rangement que je n'aimais pas avant de connaître l'histoire m'évoquait maintenant les origines tumultueux des temps de guerre de sa conception et m'a réconcilié avec cette machine.

C'était trop, il m'en fallait une…

J'ai cherché mais, soit elles étaient "trop chères" pour mon standard de prix, soit elles étaient en mauvais état. J'ai finalement acquis une Elna1 110V qui avait quelques problèmes électriques. Entre temps, mon amis collectionneur de flippers m'a fait la surprise de m'offrir pour mon anniversaire une Elna1 220 V, puis j'ai trouvé sur LBC une boîte en très bon état. Je suis donc en possession de deux magnifiques Elnas1.



Je devrai me chercher des prises pour équiper mes machines car je n'ai qu'un câble (écart de fiches 8mm, taille 16.5x24).

Dans la boîte "en état" il y avait une boîte à accessoires avec les superbes burettes à huile et "kérosène" (pétrole).


Les machines dataient de "7.49" et "8.50"… c'est marqué dessus!..


(la "7.49")

La boîte peut servir de plan de travail. C'est la raison qui m'a fait chercher une boîte en état.

Une fois habitués à cette forme originale on finit par trouver du charme à ces machines. Je suppose qu'à l'époque elles ont dû surprendre!...

Les machine ont des boîte à accessoires différentes

Non cloisonnée avec les jolies burettes en couleur

Cloisonnées avec un flacon à Kérosène (pétrole) pour lubrifier le crochet. Les deux ont quelques pieds quelques outils et le réducteur.


voir aussi sur le forum :
https://lamachineacoudre.forumactif.org/t1876-boite-accessoires-elna-sauterelle

Le système de réglage de longueur de point a une vis à molette pour mettre en butée au pas désiré. Il y a une marche arrière.

Tout est bien usiné, l'aluminium moulé est de qualité

Le réducteur utilise la fonctionnalité, utilisée pour faire les canettes, qui débraye la poulie de courroie par un basculement de clavette qui fait que la canette, mise en bout d'arbre, est entrainée par le moteur et la poulie se retrouve montée libre pour ne pas actionner le bras d'aiguille ni le porte canette.
De même en installant le réducteur on débraye la poulie de courroie et la cascade de trois pignons du réducteur entraine cette poulie par son engrenage. Ce système réduit considérablement la vitesse de rotation à puissance égale et fournit donc plus de couple. (J'ai vu que des systèmes réducteur par cascade de poulies existent pour les Necchi Bu ce serait intéressant d'en trouver un… j'ai cherché)

Enfilage de la machine pour confectionner la canette…


Enfilage de la machine pour coudre. Elle coud bien et en silence. Le bloc de tension est de qualité. la commande au genou est finalement agréable (ne pas oublier qu'elle fait frein), il n'y a pas de rhéostat qui traine par terre, c'est pratique pour 'bricoler" mais pour un usage intensif il faudra demander aux utilisateurs...



Le condensateur sur la machine en 220 avait claqué lors de la première utilisation. J'ai trouvé des conseils sur le forum. J'ai même acheté un condensateur trois fils que je poserai plus tard (ou pas car cette machine va aller sur l'étagère et ne fonctionnera que lors des révisions d'entretien).

Les pages de Thierry donnent beaucoup de renseignements sur le montage électrique de cette Elna1.
http://t.hacquard.free.fr/site4/elna1_1.html
http://t.hacquard.free.fr/site4/elna1_2.html
http://t.hacquard.free.fr/site4/condo_2.html

Comme j'ai été séduit par cette Elna et son histoire j'ai porté une regard nouveau sur les machines de cette marque. Comme mon garage va devenir petit pas question d'acheter (pour l'instant) les jolies Supermatic mais… l'occasion s'est présentée, "fortuitement", de trouver une Elna ZIG ZAG (ZZ) nommée également Elna 3 Elle était presque donnée par une association,  me voila donc avec … une troisième Elna.

Elle a été fabriquée entre 1958 et 1964. Le forum me dira si on peut la dater plus précisément.

Cette machine est une évolution du premier projet mais avec l'apport considérable du Zigzag. Elle garde les options du premier modèle : coque entièrement en métal (aluminium), bras libre, porte canette horizontale, commande au genou (sans frein). Je n'ai pas la boîte mais j'ai vu qu'elle aussi pouvait être utilisée en plan de travail.
Les autre réglages qui la mettent au niveau d'une familiale moderne : la commande qui va du bourdon au zigzag de 4mm, le calage de l'aiguille à gauche, au centre et à droite.

Elle est en 220V le moteur et le condensateur sont plus accessible que sur la "1" (3 vis)

La machine est remarquablement légère… 6Kg! (7 pour la Elna1 ou… la MIP)

On accède aux mécanismes du bas en enlevant un plaque retenue uniquement par 2 vis…

… 2 vis également pour enlever le couvercle du haut (en métal). A noter la transmission haut/bas par une courroie en "corde et crochets" comme sur la Singer 306M (et d'autres). Sur ma machine elle a l'air neuve.

J'ai commandé la lampe 15W à baïonnette...
Les engrenages hélicoïdaux sont de qualité. J'ai graissé très légèrement au lithium (M. Nonet m'a pourtant dit pas de graisse ni huile aux engrenages… jamais!... mais je fais quoi de mon kilo de graisse au lithium?)

La machine dispose de Griffe d’entraînement avec dents "pyramidales" qui accrochent autant en marche avant que marche arrière. La plaque d'aiguille est juste encliquetée.

Tous les points de graissage ont un cerclage rouge.

Le porte canette et le crochet ne sont pas horizontaux et on un devers qui vu la complication d'usinage doit avoir sa raison. Le forum me dira (notre Albert Estève de l'Office des Brevets va surement trouver).

J'ai bataillé pour enlever la vieille graisse de l'engrenage du bas et mettre de la graisse au lithium. Le système d'enroulement de canette est succinct. La roue est toute petite un joint torique devrait suffire pour la remplacer.

Je confectionne la canette. Le système est plus "classique" et se retrouve sur toutes les "modernes". En poussant la canette vers la roue la machine débraye. A noter l'enroulement de la canette va très (trop?) vite!

J'enfile la machine. Je n'ai pas la notice mais Thierry va me trouver çà (ce serait la même que la Lotus mais il y a pourtant des différences de conception).

Pour un usage intensif la boîte "plan de travail" doit devenir indispensable. Moi sans, cela ne me dérange pas. Je chercherai mais unique ment si j'en trouve une état.
Autrement, elle coud... J'ai bataillé un peu pour régler la tension du fil. Le bloc de tension est intégré sur le couvercle de tête de machine. Couvercle qui est juste encliqueté.

Je vais offrir la Elna 110V et garder cette jolie paire de machine si innovantes et qui ont tant inspiré les autres marques. Je vais chercher un portrait plus net de Ramon Casas et le mettre sur l'étagère avec ses machines.
Grand-père l'a peut être connu… ils ne seront pas loin.


Rajout du 10/08/2021
(Voir à la fin du post la Elna3 complète avec sa valise

Belle histoire de la marque en photos .....

Joli compte rendu.......Merci Simanco

Comme c'est bien raconté !
Je ne connaissais pas la Elna 3 (vu la longueur du paragraphe qui lui est consacré elle n'a pas dû passionner l'auteur de l'article de Needlebar)
Du coup, pour la notice...

Pour ceux qui seraient intéressés, je vous mets l'historique d'Elna, le lien d'origine est mort, j'avais bien fait de télécharger les fichiers.
https://we.tl/t-y5r6sbT6Tw

Les gens de Tavaro n'étaient pas à mon goût des gens bien. En résumé, des marchands d'armes qui se sont lancés dans la fabrication de machines à coudre pour occuper leur usine en temps de paix (et des juifs qui ont vendu des armes aux nazis).
Ça n'empêche pas leurs machines d'être très bien !

Merci pour cette jolie lecture du matin... et toutes ces jolies photos.
Les garages exagèrent d'être si petits.
Le Grasshopper ne me séduit pas, ni par sa forme, ni par sa couleur, mais c'est comme tout : une fois qu'on apprivoise, on apprend à apprécier.

Côté utilisation, j'ai tendance à coudre avec le bras libre (quand j'en ai un). La table de couture a tendance à me déranger, sauf dans certaines situations (rideaux épais, grandes robes)... et encore.

Pour paraphraser un peu, la couture "appartient à ceux qui se lèvent tôt"
Merci Simanco d'avoir partagé cette nouvelle passion et cet historique des Elna, et toutes ces belles photos !

C'est vrai que cette forme très anguleuse de ces machines est moins attirante que les jolies rondes noires, mais la couleur verte est là pour attirer l’œil (avant d'accrocher le client justement ?).
Mais au moins on les verra sous un autre angle maintenant.

J'aime beaucoup la conception "boîte servant de table de travail avec rangement incorporé"... très astucieux tant comme argument de vente que pour sa praticité, en cette période d'après-guerre où le coût d'une mac était encore assez élevé pour les budgets des ménages et les logements pas forcément très grands pour bien des familles.

Merci Thierry pour le lien, un peu de lecture en prévision pour mieux connaître les origines de ces machines et enrichir notre culture du monde de la couture

Les deux documents sur les établissements Tavaro sont très intéressants. Ils confirment bien que les usines d'armement se sont souvent recyclées dans la fabrication de machines à coudre, une fois la paix revenue. C'est une vieille relation d'usage. Les machines à coudre, elles mêmes, n'ont-elles pas été promues par la nécessité de faire des centaines de milliers d'uniformes nécessaires pour les guerres modernes?

Nous avions évoqué sur le forum les usines d'armement espagnoles qui avaient suivi cette démarche mais il en est de même des machines-outils allemandes, suisses ou japonaises qui se sont retrouvées désœuvrées, une fois la paix revenue, après avoir produit un si grand effort de guerre. Le savoir faire et la logistique étaient en place et sauf dans le cas des usines allemandes, encore en état. Nous avions également évoqué "mon" Omnia fabriquée à St Etienne pour être offerte à "la veuve d'un glorieux Défenseur de la Patrie"… la boucle était bouclée la même usine fournissait les armes et les machines à coudre pour les veuves…

C'est très bien ainsi. Les ouvriers et ingénieurs de ces usines ont pu ainsi continuer à vivre de leur savoir faire sur des produits plus pacifiques qui parfois dans les problèmes liés à leur conception et fabrication se ressemblent… pas dans leur finalité.

En ce moment à Bordeaux (et pour un an encore) il y a une exposition Gustav Klimt et Paul Klee qui se déroule dans la base sous-marine construite, lors de la dernière guerre, par l'envahisseur allemand. L'endroit était très décrié. Beaucoup de gens regrettaient que l'on valorise ces lieux… L'exposition est magnifique. C'est un immense succès. Il est prodigieux de constater que la "Culture" qui faisait "sortir les pistolets" à l'époque, a rendu désuète la finalité de cette construction de guerre. D'une façon remarquable, dans cette exposition, ce que l'homme sait faire de bien a transcendé et écrasé par son positivisme ce que l'homme savait faire de mal…

https://www.bassins-lumieres.com/

La conclusion : "faites de la couture et pas la guerre !" et "cousez sans entraves!"...

Tout est dit.

Tout à fait d'accord, tout est tellement imbriqué et pas aussi simple que l'on pourrait croire, y compris à notre époque moderne...

"faites de la couture et pas la guerre !" et "cousez sans entraves!".
oui! "à donf" comme dirait la jeunesse...

Comme disait Ramon (Casas) : "Entre lo dicho y lo hecho, camino derecho!"…. Voici ma Elna Lotus ZZ, la même que celle qui eut l'honneur d'être exposée au Museum of Modern Art de New-York…

Un dernier jeu de l'été avant reconfinement :
"Cher lecteurs, deux accessoires ne sont pas d'origine… saurez-vous les trouver?"
(Yes lachenaude, la petite burette, un peu plus petite que ton "clister"…)


C'est "flou" ce qu'elle est légère : 5kg avec la pédale!...


Elle a la taille d'un ancien transistor!... Transistor vous ne voyez pas ce que c'est… non, pas le truc avec des pattes… bon, on va dire à peine plus grande qu'un portable!

je fais la canette, je mets la bobinette avant qu'elle n'ait chu…


Elle coud, je vais étudier les notices de Thierry. J'ai déjà consulté ses pages très complètes sur cette machine…